Le discours de Nathalie Bicais, Maire de La Seyne :
” 8 mai 1945, à minuit , l’Allemagne nazie capitulait. Après 6 longues années de guerre, la liberté triomphait. Elle mettait fin aux années d’horreur qui avait éreinté l’Europe et vu les pays du monde s’entredéchirer dans un déluge de feu, de sang et de souffrance.
La Seconde Guerre mondiale résonne dans notre histoire comme la plus sombre des périodes. Elle est le symbole du saccage absolu : le saccage de l’humanisme, celui des libertés, celui du progrès et de l’art, celui des civilisations.
Elle est un orage noir qui s’est abattu sur l’Europe, emportant ses peuples dans un torrent de haine et de barbarie qui couta la vie à plusieurs dizaines de millions de victimes. Comment concevoir que par la volonté d’une poignée de monstres, un pays entier se mettent au service d’une machine de morts ? La rencontre entre Hermann Göring et Douglas Kelley retracée dans « Le Nazi et le psychiatre » explique comment l’endoctrinement du 3ème Reich a fait de l’homme saint d’esprit une bête sanguinaire.
Brisée par les lendemains douloureux de la Première Guerre mondiale et humiliée par le poids du traité de Versailles, l’Allemagne, société ô combien cultivée, se dévoya en cédant à Adolf Hitler. A travers sa puissante propagande nazie, instrumentalisant l’héritage des penseurs allemands tels que Nietzsche dans un fantasme d’évolution humaine supérieure allant vers son apogée, il distilla son lent et douloureux poison dans les cœurs allemands. L’asservissement dans la haine de la société allemande fit alors pleuvoir la mort et la désolation sur notre monde.
En 1940, la France sombra politiquement et militairement. La flamme républicaine survécut alors dans le cœur des Français. Ravivée dès le lendemain de l’Armistice par l’Appel du Général de Gaulle, elle devint le symbole de la Résistance et de la France Libre qui se soulevèrent et marchèrent aux cotés des alliés vers la libération.
Pour ne jamais revivre un tel drame, nous devons nous rappeler inlassablement le prix de la victoire. Il y a 80 ans, au cœur de la guerre, la machine de mort de l’Axe s’enraillait et les raisons d’espérer se multipliaient. C’est cet espoir qui emporta le cœur de fils et de filles seynois, prenant le maquis des Maures et des Basses-Alpes pour rejoindre la résistance et ses francs-tireurs. Eux qui participèrent à la libération de La Seyne au péril de leur vie, à ceux qui subirent les bombardements et à ceux qui continuèrent la résistance active de l’ombre dans notre ville, nous leur témoignons notre plus profond respect.
Bien sûr, la liste des martyrs allait continuer à croître, mais les graines de la victoire commençaient à germer dans ce terreau d’espoir.
Elles poussèrent au Monte Cassino, sur le littoral provençal, sur les plages de Port en Bessin, au rythme des sacrifices humbles et des actes héroïques qui rassemblaient de plus en plus de braves. Elles transpercèrent l’épais rideau du totalitarisme militaire et idéologique jusqu’à atteindre le cœur de Berlin et la Victoire finale, le 8 mai 1945.
Avec elle se terminaient les régimes nazis et fascistes qui avaient mis l’Europe à genou. Aujourd’hui, nous célébrons la mémoire de tous ceux qui ont donné leur vie pour que souffle à nouveau le vent de la liberté ; de toutes ces cohortes de civils morts sous le joug nazi, dans les bombardements ou dans les camps d’extermination ; tous les hommes, femmes et enfants emprunts de liberté qui par leur sacrifice, comme le soulignait Honoré d’Estienne d’Orves dans sa dernière lettre avant son exécution, ne : «désirait que la paix dans la grandeur retrouvée de la France ».
Aucun de leurs efforts et de leurs souffrances n’ont été vains. Cette paix, ils nous l’ont offerte ! La plus durable et la plus prospère que nous ayons connu.
Celle qui fédère l’Europe des peuples, appelée de ses vœux par Winston Churchill dans son discours de Zurich en 1946. Cette Europe fédérée par la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier de Robert Schuman, aujourd’hui nommée Union Européenne, est la garante de nos libertés. Avec elles, les blessures du passé se sont refermées et l’amitié franche entre nos pays est devenue l’une de nos plus grandes forces. Une union certes imparfaite mais une union de paix.
Cette paix est durable, mais elle est également fragile. Nous le constatons encore plus aujourd’hui, quand la guerre frappe l’est de l’Europe depuis plus d’un an. Pour la grande majorité d’entre-nous, qui avons eu la chance de connaître seulement la paix, le retour de la guerre sur le sol européen est difficilement concevable. Il n’en reste pas moins réel.
Devant cette réalité, nous devons faire preuve d’une grande humilité et entretenir notre mémoire. En commémorant cette victoire, ayons à cœur de nous souvenir qu’elle fut celle de notre envie irrépressible de liberté et de dignité humaine.
Ce souvenir est un héritage précieux car il nous apprend à résister à toutes les tentations totalitaires, d’où qu’elles viennent. Rien n’est plus désastreux que la banalisation de concepts dangereux ou que l’acceptation d’une violence ordinaire. Elles sont les armes des factieux qui souhaitent nous diviser à dessein.
Face à eux, comme nos aînés l’ont fait pour ouvrir le chemin de la victoire, nous levons haut nos valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité. Nous, peuple français, libre par l’engagement et le sacrifice de nos aînés, nous nous dresserons toujours contre la barbarie et la haine, pour que vive notre liberté et celle des générations futures.
Vive La République ! Vive La France !”
